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3 juillet 2010

Le Dieu des poissards et son disciple

Il existe des gens comme ça…ce genre de gars par exemple, que le Dieu des poissards a désigné comme prophète au jour de sa naissance pour une raison connue de Lui-Seul.

Petit écolier, notre pauvre ami anglais, car il est anglais, ne jouait pas au foot avec les copains ; n’empêche, lorsqu’ il s’isolait pour lire ou rêver d'un pays où le Coca coulerait à flot, le ballon lui tombait quand même dessus à intervalle régulier. La boule de cuir semblait même tenir compte de ses déplacements fréquents et avait inventé pour lui un nouveau modèle de suite mathématique. Et lorsqu’il courait son sac de billes à la main pour rejoindre ses camarades, ce n’était jamais les billes des autres que l’on retrouvait dispersées au quatre coins de la cour à cause d’une chute malencontreuse.

A l'adolescence, tous les garçons du coin lançaient à mots couverts des remarques salaces sur les filles de la table d'en face, mais il n’y en eut qu’un pour le faire au moment précis où les conversations et la musique cessèrent. Lorsqu’un trafic d’anti-sèches menaça de bouleverser radicalement les notes du devoir de français préparé par Miss Warner-Smith, notre pauvre intermédiaire, placé comme de bien entendu entre deux rangs de tricheurs, n’avait même pas prévu d’y jeter un seul coup d’œil. En français de toute façon 3 ou 5 pour lui c’était pareil. Mais 0, non, car la phrase « quand j’étais petite, je joue au football » décidément il la sentait bien. Pourtant qui écopa pour tout le monde à votre avis ?

Plus tard, lorsqu’il baissait les yeux pour éviter de marcher sur les jouets du gosse, c’était toujours pour se prendre le lustre sur le front lorsqu'il relevait la tête. Et lorsqu’il s’arrêtait sur un banc du Stanley Matthews Square pour fumer une cigarette en rêvant d’un monde où l’Happy Hour durerait deux heures de plus, avoir choisi ce banc selon les modèles les plus rigoureux du principe de précaution ne lui servait à rien : les marginaux du Square appliquaient méthodiquement et sans le savoir la suite mathématique inventée par la boule de cuir d’autrefois, si bien que lui et lui seul leur servait à la fois de confident, de vache à clope et de souffre-douleur. Et lorsque la chanteuse-drag queen-stripteaser-illusionniste, dont la tournée faisait halte ce soir-là au Snooker’s Temple de Brighton, désigna un cobaye innocent pour ses numéros comiques, c'est bien lui qui s’y colla, malgré ses yeux rivés sur ses lacets défaits qui le firent d’ailleurs trébucher sur scène un instant plus tard.

Mais point n'est besoin de gagner pour entreprendre...il décida un beau jour de combattre le mal par le mal en se lançant en solo dans le genre de carrière où la malchance a des conséquences autrement plus graves que les petites humiliations dont il avait l’habitude. Après tout peut-être que cela mettrait un terme à la malédiction ? Quand on veut on peut, pas vrai ? Il était fataliste, et savait que de toute façon les flics et/ou les voyous s’acharneraient sur lui. Alors qu’il soit pris la main dans le sac ou condamné pour avoir été juste là au mauvais moment et au mauvais endroit, au fond ça lui était égal.

Et le Dieu des poissards sembla en effet lui avoir lâché la grappe, 38 ans après que son père ne l'ait pour la première fois laissé tomber dans le caniveau au sortir de la maternité. Et ce malgré une ou deux entourloupes mal ficelées mais qui, grâce au bénéfice du doute (oui, le bénéfice du doute !!), n’avaient pas eu de conséquences durables sur sa liberté d’action. Avec le magot de petits larcins et de cambriolages peu risqués, il avait maintenant de quoi vivre et payer les pensions alimentaires de ses deux ex-femmes sans trop sortir de chez lui. Et ne pas sortir, cela signifiait : pas de risque d'être condamné pour s’être attiré des ennuis sans intention de les attirer. Et d’après ses calculs, il en avait même presque terminé avec les risques du métier, car bon Dieu avec son expérience des suites mathématiques il était supérieurement doué pour les pronostics sportifs et le poker en ligne. Internet lui offrait une occasion inespérée d’exploiter un talent qu’il aurait inévitablement gâché par la fréquentation de bookmakers véreux ou de joueurs mauvais perdants. Encore un ou deux coups, et puis…

Et puis voilà…voilà ce que l’agence Reuter nous rapporte du dernier cambriolage de notre malchanceux ami :

« Mr L.C., 38 ans, ne s'attendait pas à être surpris par le propriétaire de la maison qu'il essayait de cambrioler, mais sa plus grande surprise a été de se retrouver face à un lutteur de 120 kilos. M.Kalinowski, un polonais de 38 ans, n'a pas spécialement apprécié de voir Mr C. détenant l'ordinateur portable de son fils. "Peut être que c'était l'adrénaline mais je n'avais pas peur parce que c'était ma maison, mon château comme vous dites en Angleterre", a raconté M. Kalinowski. Ainsi ce dernier qui adore la lutte et les sports de combat est parvenu à immobiliser le voleur en lui faisant une prise. Ce sont les voisins qui ont prévenu la police alors que le voleur, toujours immobilisé, implorait son assaillant de le laisser partir. L. C., qui n'en est pas à son premier délit a été condamné à deux ans de prison. » 

Ouais…quand ça veut pas…

A demain.

(A part pour la dépêche Reuter, tout lien avec des événements réels serait purement fortuit) 

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