Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Hyperpertinent
Publicité
Derniers commentaires
Archives
31 août 2010

Froidure et cinéma : rétro février 2010

Le rythme des saisons ne devrait normalement pas atteindre le spectateur de cinéma. Le rude février 2010 nous prouva le contraire. Au programme : froideur, violence, cruauté, baston, guerre, névrose, paranoïa, et heureusement un peu d’humour pour finir.

Pour se placer immédiatement dans le ton  de ce mois glacial, le spectateur idéal se devait bien de s’infliger dès le premier février à la tombée de la nuit la vision de Tsar de Pavel Lounguine…Si il vous prend l’envie de découvrir ce film un jour, sachez bien que rien ne vous sera épargné, et  surtout gardez votre télécommande à portée de la main. Car voici le portrait sans concession ni sympathie du terrible Ivan, le premier Tsar de toutes les Russies, bigot fanatique et possédé , despote paranoïaque et cruel, sans pitié ni pour ses dents (j'espère pour l'acteur que ce ne sont pas vraiment les siennes) ni pour ses proches. Entre Michael Corleone et Ivan, préférez le premier car au moins il se contentera d’une balle dans la tête. Le résultat est le même mais au moins ça va vite, et le spectateur soulagé s’en contentera. Car ce spectacle est insoutenable, le cinéaste désirant se monter aussi inflexible dans ses choix qu’Ivan dans sa volonté d’imposer sa politique. Et quand je dis politique, je n’évoque pas les nobles citoyens réunis à l’Agora pour discuter sous le soleil d’Athènes de sujets essentiels entre deux verres d’Ouzo. Non, là je parle d’une volonté de puissance sans limites, d’opposants martyrisés, de « traitres » châtiés, de paysans exploités, je ne parle donc pas de demi-frappes démocratiques mais du puissant Ivan et de ses « Chiens de guerre » ;  et ça déménage. A tel point que la dernière séquence du film nous donne à voir une sorte de parc d’attraction de la torture dont le Tsar ordonna lui-même la construction. A part cela, les acteurs et les décors sont prodigieux (Ivan est incroyable),la reconstitution très crédible (pour ce que je connais de cette époque, évidemment…), le face à face entre Ivan et "son meilleur ami" le métropolite de Moscou très prenant. Mais devant tant de complaisances à nous montrer toutes les horreurs possibles de ce règne impitoyable, la question que nous nous posons, la seule qui s’impose, la voici : pourquoi ? Et bien il semble que Pavel Lounguine ait été inspiré par de nobles intentions ; constatant la remontée en flèche de la popularité d’Ivan (et de Staline, le parallèle est inévitable), il cherche à dire à ses concitoyens : « Vous voulez voir le vrai Ivan ? Et bien je vais vous le montrer, moi. » Ce qui revient à dire qu’il n’y a pas de nostalgie à avoir et que le prix à payer pour la puissance de la patrie est un petit peu lourd…Le raisonnement est bon, et au moment de porter un jugement deux choix s’offrent à nous :  soit admirer l’intégrité de ce choix intellectuel et esthétique, et supporter stoïquement le souvenir de ce moment pénible en se rappelant aussi que ce terrible spectacle n’est pas si gratuit ; soit…soit…vomir, et envisagez de ressortir pour votre gouverne la bonne vieille expression de Télé 7 jours : « Ames sensibles s’abstenir !» Dont acte. Pas beaucoup plus d’espoir dans le très remarquable Lebanon de Samuel Maoz, mais un peu plus de chaleur : ça se passe au Liban. Et à huis clos dans un char, soit une heure et demi en apnée : le danger qui nous guette serait plutôt l’étouffement, et de fait l’atmosphère est irrespirable. Le réalisateur sait de quoi il parle puisque il a lui-même combattu dans un char pendant la guerre du Liban, et ça se voit…tout est juste dans ce film, le choc initial, les cas de conscience, les rapports humains, le contexte, le déroulement des événements et le suspens haletant qui en découle, l’humanité des personnages…je ne vais pas développer les qualités de ce film que vous serez de toute façon tentés de voir un jour (« accrochez-vous ! » comme dirait Télé Star) et qui reçut un Lion d’Or a priori mérité à Venise. Un peu de repos avec Oceans de Jacques Perrin, quoique…énième film documentaire « généraliste » consacré à l’ « environnement » depuis quelques années, Océans bénéficie d’images parfois superbes (encore heureux, on nous l’a assez dit…) mais n’est ni le plus original ni le meilleur film du genre. Le film britannique La planète bleue, datant de 2003 mais très vite oublié visiblement, sonnait moins artificiel, offrait des images époustouflantes de poissons vivants à plusieurs kilomètres de profondeurs, et inventait une sorte d’opéra tragique autour d’un banc de poissons attirant requins, baleines, otaries…que Jacques Perrin a repris pratiquement tel quel (en moins bien), ainsi que pas mal de séquences…ce n’est pas tellement qu’il y ait plagiat (franchement il faudrait d’autres sources que mes simples souvenirs, et puis après tout ces gens-là ne font que copier Cousteau, voire la nature au fond…), mais on nous a tellement vendu l’originalité et l’ambition du projet français que pour tout dire, j’ai franchement un doute sur le résultat…en fait, je vous conseille surtout de préférer l’original à a copie et de voir en dvd La planète bleue (si toutefois vous n’êtes pas anglophobes et que les poissons vous intéressent). Vous éviterez au moins l’insupportable quart d’heure de moralisation écologique (sous couverts d’éduquer vos descendants sans doute) qui ponctue le film de Jacques Perrin. Allez, fini les orques croquant des phoques,  retour à la bagarre entre humains, mais à la fausse bagarre cela dit avec Sherlock Holmes de Guy Ritchie, avec Hubert Downey Junior et Jude Law. Je n’en attendais pas grand-chose, n’étant sensible ni au mythe Sherlock Holmes (et n’y connaissant pouic) ni en général aux films promettant des bagarres « kung fu style » à profusion. Et bien du coup j’ai trouvé ça très amusant, le mérite je pense aux personnages très sympathiques et intéressants, campés par des acteurs non moins sympathiques et intéressants. La palme à Hubert Downey Junior, très bon acteur de films d’actions auxquels il ajoute son humour et son côté « filou-coureur de jupons-irresponsable notoire ». Il rappelle un peu Sean Connery en James Bond, et pour les plus cinéculeurs de mouche dont je suis, il ressemble beaucoup au rebondissant Douglas Fairbanks Junior dans Sinbad le marin (1947, garantie décors carton-pâte).  Bon, je risque de redire la même chose pour Iron Man II…Enfin, ma compagnonne de cinéma préférée (que je salue au passage puisqu’il est maintenant démontré qu’on ne peut échapper à Internet même au fin fond des pays qui manquent d’eau potable) m’assura que le film était plus fidèle qu’il en avait l’air aux personnages originaux, alors…alors retour à la paranoïa et aux grosses gouttes qui perlent sur le front avec Shutter Island de Martin Scorsese. En effet, c’est dingue ce que Leonardo Di Caprio fabrique de gouttes qui perlent sur le front pendant ce film. Il est très fort. Et en fait un peu des tonnes. Mais c’est un peu un problème selon moi car il apparait très vite comme un personnage très perturbé, ce qui nuit un peu au retournement final…oui, il y a un retournement final, mais tout le monde vous l’a déjà dit cent fois, ne me regardez pas comme ça. D’un autre côté, ayant lu le livre, ce même retournement ne m’a pas vraiment surpris…Bon, autant le dire tout de suite, j’ai été assez déçu, mon intérêt pour le film s’effilochant au fur et à mesure que les gouttes s’accumulaient sur le front de Di Caprio, autrement dit à mesure que nous découvrons ses tourments névrotiques, sa femme et ses enfants disparus, son obsession pour les juifs délivrés à Auschwitz…tout ça constitue un patchwork un peu trop confus. Mais j’ai sans doute tort d’être trop sévère pour ce film qui reste quand même largement au-dessus de la moyenne, et il conviendra par conséquent de le revoir avec un œil nouveau dégagé de toute impatience…mais comme nous parlons de Maitre Scorsese et d’un très bon roman, je me sens en droit d’être un peu déçu et surtout d’être déçu d’être un peu déçu. En tout cas, si vous n’avez pas lu le livre, vous prendrez sans doute beaucoup plus de plaisir car vous n’anticiperez pas les développements de l’histoire. BON, après être passé par toutes les souffrances possibles et les pires mauvaises consciences, il était temps de finir ce mois par un peu de légèreté avec Fantastic Mr Fox de Wes Anderson avec la voix de Georges Clooney et de Meryl Streep. C’est l’histoire d’un renard futé et de la lutte qu’il mène avec sa famille et ses potes animaux contre des propriétaires que l’on qualifiera de cupides et méchants. C’est de l’animation en volume, et c’est toujours très joli. C’est du Roald Dahl, et c’est toujours assez marrant. Bref, c’est très agréable à suivre, très drôle et pas trop niais malgré l’histoire qui comme vous pourrez le constater ne se démarque pas trop des cadres habituels des films d’animation. Cela dit, après avoir commencé par Tsar, j’aurais même fini sans déplaisir par Les bisounours.


Classement du mois :

1) Lebanon

2) Fantastic Mr Fox

3) Shutter Island

4) Sherlock Holmes

9) Oceans (oui, je sais je suis passé de 4 à 9,c’est comme qui dirait pour souligner le fait que tout compte fait Océans c'est pénible et négligeable)

Prix de l’effroi 2010: Ivan le Terrible

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité